Histoires de blocages en maths

Publié le 24/04/2023

Antoine

Antoine est élève en Première. Il a choisi la spécialité maths parce qu’il veut devenir ingénieur. Alors que jusqu’à la classe de seconde, tout se passait bien, il réussissait sans vraiment travailler, cette année c’est très compliqué. Il vient me voir parce qu’il n’arrive pas à s’organiser dans son travail, at qu’il a des mauvaises notes malgré le temps passé à travailler. Il se décourage.

Lui réexpliquer son cours et faire des exercices avec lui n’est pas très utile, en première approche. D’ailleurs il prend des cours particuliers et sa situation ne s’améliore pas.

Comment faire ?

La première étape est de  diagnostiquer précisément ce qui coince. Antoine a une « fausse idée » de la façon dont on doit s’y prendre. Il pense, entre autres, que la solution arrive immédiatement- ou n’arrive pas. Il pense également qu’il n’a pas de chance, et qu’il tombe toujours sur un exercice qu’il n’a pas eu le temps de faire chez lui. Il n’apprend pas son cours, parce qu’il « comprend en cours ». Néanmoins, quand je lui demande de m’expliquer ce qu’est une suite numérique, il bredouille « heu, je sais ce que c’est mais je ne sais pas l’expliquer ».

Sa technique pour réviser est de faire 4 heures d’exercices d’affilée le dimanche. En fait, il travaille avec des annales et regarde très vite la correction. Et à chaque fois, il se dit « ah oui, bien sûr ».

Un travail méthodologique s’impose, et d’abord de déconstruire ses croyances à propos des maths.

La réponse, il faut aller la chercher, en exploitant méthodiquement son cours – qui sert ! – et en se posant les bonnes questions.

Laura

Laura est élève de classe préparatoire scientifique dans un grand lycée de centre-ville. Elle a un professeur de mathématiques brillant et très compétent… en mathématiques. Il est plutôt élitiste, au sens où son public ce sont « les bons élèves ». Les autres, « ils ne travaillent pas assez ».  Laura était une bonne élève au lycée, (sinon elle ne serait pas en prépa), mais cette année « ça ne marche pas ». Elle travaille beaucoup, elle a des mauvaises notes, elle se prend des réflexions désobligeantes (en tout cas, elle les ressent comme cela). Elle a peur, elle a perdu confiance en elle.
Quand je la reçois dans mon cabinet elle est en larmes. Elle pense qu’elle n’est pas du tout à sa place.

La première chose à faire est d’accueillir ses émotions, puis de lui permettre de prendre du recul. De la recentrer sur ses objectifs (les concours) et dans cette perspective, les différentes évaluations ne sont que des indicateurs.

Au cours de la séance suivante, je l’amène pas à pas à prendre conscience de ce que veut dire « comprendre » un cours, avec les 5 questions (Quoi, d’où, avec quoi, comment, pour quoi). Nous travaillons à construire une carte mentale sur son cours (espaces vectoriels). Elle prend conscience qu’elle n’en avait qu’une connaissance superficielle.

Après deux autres séances de méthodologie, et de dédramatisation, il est enfin possible de se mettre à faire des maths sereinement.

Yassine

Aujourd’hui, je reçois Yassine et sa maman dans mon cabinet. Yassine est en classe de troisième. Il commence à perdre pied en maths. Quand je lui demande ce qui est sa plus grosse « zone d’ombre » en maths, il répond aussitôt « je ne comprends rien aux fractions ».

Les fractions sont souvent un point important de blocages en maths. Il faut dire que c’est un objet mathématique qui n’est pas simple à comprendre. C’est « en même temps » un nombre et une opération. De plus une même fraction se présente de manière différente, elle a plusieurs écritures (1/2=2/4=3/6 etc.)

En fait la bonne définition d’une fraction c’est « une classe d’équivalence pour la relation (a,b)R(c,d) ssi ad=bc dans Z x N ». Notez bien qu’à une époque on faisait comme cela au collège (les fameuses maths modernes). J’admets que ce n’est pas la tasse de thé de tout le monde.

Tout cela pour expliquer qu’une fraction c’est un objet complexe (on retrouve la même problématique avec les vecteurs). C’est amusant pour un mathématicien de voir que pour un élève « 1/2 c’est 0,5 ». C’est vrai bien sûr mais l’élève accorde plus de « vérité » à 0,5 qu’à 1/2. Le souci c’est que 1/3 ce n’est pas 0,33. Et on ne peut pas toujours travailler avec des nombres à virgule en maths.

Yassine en tout cas n’a aucune image mentale de ce qu’est une fraction.

La première chose à faire en séance est de passer du temps à manipuler, et de voir où il en est avec la division. Pour cela j’utilise ma boîte d’allumettes et on fait des divisions « manuelles », au sens de partager les allumettes en plusieurs tas.

Yassine a surtout besoin d’être rassuré. Parce qu’à force de ne pas arriver à faire ses calculs, il a perdu confiance en lui. L’idée est de prendre le temps pour construire pas à pas avec lui la notion.

Dans le calcul des fractions, on trouve les tables de multiplication (pour simplifier), la notion de proportion, les pourcentages,  les  nombres à virgule, l’écriture symbolique avec des lettres (pour exprimer les règles de calcul), et la capacité à voir un même objet sous plusieurs formes, ce qui est une compétence fondamentale en maths.

En se réconciliant avec les fractions, Yassine se réconcilie avec les maths et retrouve confiance en lui.

Julie

Julie est en seconde. Jusque-là, elle se débrouillait plutôt pas mal en maths au collège. Sa matière préférée est la SVT, en particulier tout ce qui touche au corps humain. Elle a très envie de devenir médecin, ou kinésithérapeute, elle ne sait pas encore complètement. Ce qui est bien normal en seconde.
Dans tous les cas, elle veut/doit choisir la spécialité Maths en classe de Première.
Et c’est pour cela qu’elle vient me voir.

Elle n’aime pas les maths !
Elle n’aime pas les maths, ne comprends pas à quoi ça sert,
en particulier les vecteurs. Et les calculs, alors qu’il y a des ordinateurs puissants, et qu’on vient de mettre en ligne ChatGPT !

(ChatGPT sait dériver des fonctions, on le regarde ensemble. C’est vrai que c’est assez bluffant. La seule difficulté pour nous est d’écrire les fonctions au clavier.)

Je commence par lui faire faire son « blason mathématique », en répondant à ces cinq questions :
1. Qu’est ce que tu fais bien en maths ?

2. Qu’est-ce que tu aimes faire en maths ?
3. Quelles sont tes zones d’ombre, ce qui te pose problème ?
4. Où tu vois des maths dans la vie ?

5. Les maths pour toi c’est quoi ?

Ce qu’elle réussit, c’est le calcul littéral. Elle aime comprendre la logique, le raisonnement. Elle ne voit pas à quoi ça peut lui servir dans le quotidien, et ne voit des maths nulle part dans la vie. Pour elle les maths c’est OBSCUR.

Je lui parle un peu des débats qui ont eu lieu au moment du covid, en particulier sur l’efficacité des vaccins. Comme je sais qu’elle veut être médecin, je choisi un thème en lien).

Comment décider si un vaccin est efficace ou pas, voire s’il est nuisible ou pas ? Plus généralement comment décider si un médicament est efficace ou pas ?

Comment sortir de l’affectif et du cas particulier (« moi je connais quelqu’un qui…) ?

Comment les maths et l’analyse des données peuvent nous aider à prendre une décision, et quelles en sont les limites. On cherche ensemble d’autres situations où les maths peuvent nous apporter une réponse. On arrive vite au fait que pour être un citoyen éclairé, il est important d’avoir quelques notions de base en maths.

Cette première séance a servi à déconstruire-reconstruire son rapport aux maths. Il s’agit de redonner un peu de sens pour elle, dans la perspective de son projet de faire médecine.

 Il y a aussi ce passage de l’adolescence à l’âge adulte, où on est mis devant ses contradictions. Je la confronte un peu : « ou tu es dans le système, ou tu le refuses. Mais tu ne peux pas dire que tu veux faire médecine et que les maths ça ne te sert à rien, parce que dans tous les cas, c’est obligatoire pour ton projet. Moi ça m’est égal, tu peux changer de projet, mais si tu restes là-dessus, qu’est-ce qu’on peut faire ? »

Pendant cette première séance, vous l’aurez compris, pas de maths, pas de calculs, pas de démonstrations. Un dialogue sur le sens de la vie, et sur le sens de sa vie.

Pour vous faire accompagner dans vos blocages en maths, contactez un praticien Maths sans Stress !