» Bonjour, je suis la mère d’Alexandre, qui est en terminale, avec la spécialité Maths. Je pense qu’il est fortement stressé. Nous avons besoin de votre aide ! S’il vous plaît rappelez moi au plus vite ! “
Je la rappelle et nous discutons. Elle me donne de nombreuses informations sur sa perception de ce qui se passe pour son fils. Elle est sûre qu’il est stressé et qu’il a besoin du soutien de Maths Sans Stress.
“L’entretien préalable …”
Mais avant tout, je lui indique que je dois discuter avec Alexandre lui-même. J’ai besoin qu’il m’accorde 30 min de son temps, pour qu’il me dise lui-même ce qui se passe et comment il ressent les choses.
Ensuite, si je pense que je peux l’aider et qu’il est prêt à s’engager à ce que je l’aide, nous allons construire ensemble un plan d’actions qui répondra à l’objectif que nous nous sommes fixés.
Lors de l’entretien avec Alexandre, nous faisons un petit tour d’horizon de la situation. Il n’a pas de difficulté pour comprendre ses leçons. Certains concepts sont certes un peu difficiles d’accès, par exemple “les taux d’accroissements”, mais en Terminale Spé Maths c’est tout de même un peu normal ! Pas de problème pour mémoriser son cours, pas de problème non plus pour démarrer les exercices.
Et côté stress comment te sens tu ?
- Et côté stress comment te sens tu ?
- Oh ! Ça va …
- À combien estimerais-tu ton niveau de stress sur une échelle de 1 à 10, avec 1 si tu te sens super zen et 10 si tu te sens super stressé ?
- Je me donne 10/10.
Je travaille à fond les maths et la physique et pourtant je me sens rabaissé lorsque je reçois une mauvaise note ou une note très moyenne … comme si mes efforts n’étaient pas reconnus.. Je prends des cours particuliers toutes les semaines. Il est très important que j’ai un bon dossier Parcoursup pour mon projet personnel. Quand le prof rend les copies j’ai la boule au ventre. Il distribue les copies une par une en suivant l’ordre décroissant des notes. Il annonce le nom et la note pour chaque copie, ou bien il se permet des commentaires. Je me sens rabaissé et j’ai vraiment l’impression qu’il remue le couteau dans la plaie. En plus quand je regarde ma copie je me rend compte qu’il ne me met pas tous les points même quand j’ai juste.
Nous venons d’identifier un point essentiel concernant le stress d’Alexandre : la relation entre Alexandre et son professeur.
“Le programme …”
Nous établissons un programme qui abordera les points suivants :
- d’une part, investiguer ensemble les composantes de la relation avec son prof. Identifier d’abord les éléments factuels, comme ces exercices “justes” mais qui n’obtiennent pas tous les points prévus. Puis rechercher les éléments non factuels en lien avec ses émotions, ses pensées, ses croyances.
- d’autre part, sur la base de ces observations, identifier des outils pratiques et pertinents afin de développer des compétences qui neutraliseront ce stress qui le vide de son énergie et limite considérablement ses capacités.
- enfin, déterminer comment intégrer et maîtriser des concepts mathématiques qui sont moins intuitifs que ceux qu’Alexandre a rencontrés jusqu’en première.
“Les éléments factuels … et les autres…”
Lors de la première séance, nous regardons ensemble sa copie et, chaque exercice, l’énoncé, la rédaction d’Alexandre, le commentaire du professeur. Nous bloquons sur un exercice sur les suites et son application illustrée par l’étude d’une espèce en voie de disparition et par un projet de réintroduction d’individus de cette espèce chaque année afin d’éviter cette disparition. En effet, Alexandre estime avoir trouvé la solution à chacune des questions et pourtant il perd la moitié des points à chaque fois … jusqu’à la dernière question où il est sûr d’avoir juste. Fort de cette conviction, il est allé voir son prof à la fin du cours mais ce dernier ne veut rien entendre et c’est sans appel. Alexandre se sent incompris et trouve la situation profondément injuste. Il est tellement en colère qu’il est reparti en froissant sa copie et en la jetant par terre.
“L’écoute … l’écoute … l’écoute …”
Je l’écoute et tente de poser des questions … mais c’est trop tôt … je dois l’écouter … Alexandre doit se sentir écouté, écouté, écouté … et entendu … et reconnu … avant tout autre chose. Les arguments rationnels, les éléments factuels sont évidemment indispensables. Mais ici et maintenant c’est mission impossible !
Imaginons quelques instants notre cerveau comme un œuf, simplement séparé en deux : en bas les émotions (la partie non rationnelle ou non factuelle) et en haut la réflexion (la partie rationnelle ou factuelle).
Tant que le cerveau est envahi pas les émotions (Phase de stress élevé), il est peu efficace de solliciter la couche rationnelle. Les questions et les conseils s’adressent au rationnel qui n’a plus beaucoup de place lorsque l’émotionnel nous submerge.
Nous allons donc tout d’abord œuvrer afin de diminuer la pression “à l’étage des émotions » tout en stimulant avec beaucoup de douceur « l’étage de la réflexion” (Phase de retour à l’équilibre).
Comment ?
1) d’abord, avec empathie et bienveillance, j’écoute et j’accueille les émotions d’Alexandre sans les juger,
2) ensuite (et seulement quand la « tempête » émotionnelle est calmée), je découvre avec Alexandre ce qui est vraiment sur la copie. Nous regardons ensemble sa façon de rédiger et il prend conscience que cette rédaction peut amener à différentes interprétations de la part du professeur,
3) enfin, je lui explique que que le professeur ne peut pas deviner si les conditions d’utilisation d’une propriété ont correctement été envisagées par l’élève… si elles ne sont pas écrites sur la copie. Et même s’il les devine, c’est à l’élève de montrer qu’il les a considérées.
“Le déclic …”
J’explique mais je dois surtout écouter Alexandre … pour qu’il m’écoute à son tour.
Jusqu’au moment où le déclic arrive ! Alexandre s’arrête de parler, il réfléchit. Le silence a besoin de place… puis Alexandre dit : “je comprends !”.
Il vient de réussir à accueillir et à accepter cet exercice, cette rédaction imparfaite, ce commentaire trop expéditif.
Nous avons alors pu regarder plus sereinement ce que le professeur disait ou écrivait, comment cela pouvait être interprété, comment cela venait le toucher.
Observation … et défusion …
Nous avons observé ensemble ce qui s’était passé avec le professeur, lors des cours, lors de la remise des copies, dans la copie elle-même et puis durant l’altercation entre Alexandre et son professeur.
Nous avons observé et noté chacun de ces moments, comme si nous les redécouvrions. Et puis nous avons regardé chaque moment en nous posant les questions suivantes :
« Est-ce que ce qui se passe parle
- de moi ?
- de ma copie ?
- de ce que je crois ?
- de ce que mon professeur croit?
- de son humeur ? »
Au final, en observant chacun de ses éléments (et même s’il n’avait pas la réponse à toutes ces questions) Alexandre a réussi à devenir un observateur de ce qui s’était passé. II est parvenu à se distancer de ses pensées, ce qui est le principe même de la défusion. Cette dernière aide à prendre le contenu de ses pensées avec plus de légèreté ainsi qu’à reconnaître qu’une pensée n’est qu’une pensée et… pas la vérité ! Alexandre n’a pas forcément remis en cause le contenu de ses pensées ni leur degré de réalisme mais il a modifié la relation qu’il entretient avec elles. Au final, c’est comme si il prenait conscience qu’ :
- il n’est pas ce que le professeur dit,
- il n’est pas ce que le professeur dit,
- il n’est pas ce que le professeur croit,
- il n’est pas cette copie avec une mauvaise note.
Une source de stress en moins…
Grâce à ce processus de défusion cognitive, Alexandre a pu apaiser et diminuer le stress généré par sa relation avec son prof.
Nous avons continué quelques séances pour ancrer cette compétence, et apprendre aussi comment aborder les concepts mathématiques qui ne lui paraissaient pas intuitifs.
À l’issue de mon accompagnement, Alexandre a atteint son choix numéro un dans Parcoursup. J’ai reçu récemment de ses nouvelles. Il terminait son message par “… Concernant, mon année de terminale, c’était loin d’être ma meilleure année, mais vos séances m’ont permis de m’accrocher, surtout en maths, donc je vous remercie pour ça, il me fallait un peu de motivation externe pour continuer de m’accrocher, et c’est ce que vous avez fait.”
Je te remercie Alexandre pour ce retour qui renforce encore plus mon engagement dans l’aide aux élèves, étudiants et adultes qui font face à un blocage en maths, et dans le déploiement de notre méthode Maths Sans Stress©.
Auteur : Stéphane Jaubert