Portrait d’amateur de maths avec équation – 3

Publié le 27/11/2016

Portrait de François-Julien Bastouil

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François-Julien au tournoi de poker de Lloret Del Mar

François-Julien a 39 ans, il est professeur de mathématiques en lycée, en centre-ville de Toulouse. Il enseigne en seconde, première et terminale et donne également des colles en classes préparatoires. Il a toujours voulu être professeur, mais pas forcément de mathématiques. Ce n’est pas si fréquent comme démarche, très souvent on devient professeur parce qu’on apprécie particulièrement une discipline et que c’est une solution pour y consacrer son temps. (C’est à mon sens une erreur, on se réserve bien des déceptions…). Lui non. Ce qu’il aime, c’est transmettre, c’est la pédagogie, l’humain. Voir les jeunes progresser.

Il se présente lui-même comme un épicurien. Il aime profiter de la vie, son travail n’est pas tout pour lui, sa famille compte énormément, sa femme et ses deux enfants. Il est également attaché à la région toulousaine, dans laquelle il est né et a grandi. Il est donc particulièrement heureux d’avoir pu y revenir après dix ans passés en région parisienne.

Il est très souriant, plutôt bavard, c’est très agréable de converser avec lui. Il dégage une joie de vivre certaine ; néanmoins, il est parfois plein de contradictions, c’est assez touchant.

Quand il parle de sa grande passion, le poker, François-Julien a les yeux qui brillent, et il semble s’amuser beaucoup.

Comment la passion du poker t’est-elle venue ?

Il y a quelque chose d’un peu artificiel au départ. Le travail ne m’a jamais épanoui complètement. Même pendant les études, je n’ai jamais pu exister que par le travail. J’ai ressenti le besoin d’avoir quelque chose, une occupation dans laquelle je pourrais progresser toute ma vie, qui ne soit jamais finie, répétitive. Rentrer le soir du travail, se mettre dans son coin à réfléchir, pratiquer, sentir que je m’améliore, avoir des résultats.

J’ai essayé tout un tas de choses, par exemple, le sudoku ou les échecs. Je voulais trouver une occupation cérébrale en lien avec les mathématiques.  Le peu que j’ai vu de l’univers des échecs ne m’a pas du tout plu. Les débutants n’ont pas leur chance. Un de mes amis était bon joueur : il me demandait « en combien de coup veux-tu que je te gagne ? », et il me gagnait.

Je suis allé en Russie et j’ai joué pour la première fois de ma vie au casino, avec toute l’atmosphère locale. J’ai découvert l’ambiance, les croupiers, les tapis, les jetons. J’ai beaucoup aimé, j’ai vraiment eu un « shoot ». Pas pour la roulette, c’est un jeu inexploitable, c’est un pur jeu de hasard.

Quand je suis revenu en France, c’était le début du poker avec Patrick Bruel à la télévision. C’est lui qui a démocratisé le poker. Tous les jeunes de ma génération regardaient ça le soir, fascinés. Il y avait de grosses sommes en jeu, les gens gagnaient des millions.

 J’ai tout de suite senti qu’il y avait des mathématiques là-dessous, ne serait-ce que dans les probabilités d’apparition des cartes. Je me suis lancé là-dedans.

Par contre, je ne supporte pas de perdre de l’argent, je ne pourrais pas accepter d’en perdre en faisant cette activité. Donc j’ai commencé humblement, des petites tables à quinze centimes, vingt centimes, juste pour apprendre le jeu, pour maîtriser la règle du jeu. Et puis je me suis pris de passion. Je joue depuis 2006, tous les jours. Parfois, c’est simplement vingt minutes le soir ; cette activité me permet de me vider la tête après le travail, c’est mon sas. Certains regardent la télé, d’autres dansent, moi c’est le poker.

Je joue en ligne et puis depuis sept, huit ans je fais du poker « en vrai ». Cette année, je suis allé à deux gros tournois, à Gujan-Mestras et à Lloret Del Mar. Des tournois à 550 euros pour les quels je me suis qualifié.  C’est une énorme satisfaction de pouvoir participer à une grosse épreuve, avec des joueurs professionnels, des gens qui viennent de toute l’Europe.  Le premier gagne 40000 euros, donc tu vois ça commence à être sérieux.

Mon plus gros gain au poker, c’était une fois à Paris, en cercle.  2000 euros, en liquide.  L’an dernier j’ai réalisé 6000 euros de bénéfices.  Par contre, je ne m’inscris jamais à un tournoi à 50 euros si je n’ai pas gagné cette somme avant.

Le poker n’est pas totalement un jeu de hasard comme la roulette, ni totalement un jeu de compétence pure, comme les échecs.  Il y a des gens aux Etats-Unis qui ont fait des calculs, et la part de chance dans le poker est évaluée à 60%. Aux échecs, on va se faire laminer par le meilleur quoi que l’on fasse. Alors qu’au poker, il est possible de gagner contre le meilleur joueur du monde. Mais bien sûr, sur le long terme, ce sont les joueurs qui ont les meilleures compétences qui récupèrent tous les gains. Une étude américaine montre le nombre de ces « gagnants » ne représente que 5% des joueurs.

C’est un jeu de décision, similaire à la Bourse. On achète, on vend un coup. Il y a tout un système de cotation, en fonction des cartes que l’on a en main, de l’argent demandé pour jouer, des probabilités que les autres aient une meilleure main. Cela dépend aussi du gain espéré. Parfois, on sait que l’on a très peu de chances de gagner, mais ce que l’on peut gagner est tellement énorme par rapport à la mise que cela vaut la peine de tenter. Ou parfois, on a compris que l’adversaire est mauvais, qu’il ne maîtrise pas du tout le jeu, alors on suit.

Qu’est-ce que cela veut dire être bon au poker ?

Etre bon au poker, cela implique d’avoir un certain nombre de connaissances mathématiques. C’est un crime de s’asseoir à une table sans connaître les chiffres de base ! Le mauvais joueur pourra par exemple croire – et dire- « ah, si j’avais touché un 8, j’aurais explosé la table ! » alors qu’en fait il n’ avait qu’une chance sur cent de recevoir un 8.

Néanmoins, cela m’arrive de jouer des coups déraisonnables d’un point de vue des probabilités. Dans ce cas, c’est parce que le risque est tellement faible par rapport au gain espéré. C’est un peu comme le loto. Au pire, on perd deux euros. Qu’est-ce que c’est par rapport au gros lot ?

Est-ce que tu veux dire qu’il y a une part d’irrationalité dans ce jeu ?  Même les gens qui comme toi connaissent les statistiques et les probabilités de chaque coup, cela leur arrive de se fier à leur intuition ?

Bien sûr, sinon, ce serait comme les échecs, écrit d’avance. Dans ce jeu, c’est important de tenir compte de la personnalité des joueurs assis à la table. Il est impératif de les observer, de deviner leur façon de jouer. Le facteur humain est très primordial.

Il y a les tics, il y a des typologies de joueur. Je les ai répertoriées. Par exemple le gambler, c’est celui qui vient dans un casino pour vivre des émotions fortes, ça se voit tout de suite, c’est physique, il vibre quand les cartes sortent. Ce qui l’intéresse c’est la possibilité de gagner, ce n’est pas du tout l’optimisation du jeu… Dès qu’il est éliminé, il se précipite aux machines à sous pour continuer à vibrer.

Et toi, quel est ton type ?

Je ne suis pas du tout comme ça, moi je suis très rationnel. Maintenant j’ai pas mal d’expérience, mais au début je me demandais toujours « est-ce que j’ai bien joué ou pas ? ».

Qu’est-ce que cela veut dire bien jouer ?

Cela veut dire jouer de façon optimale. Par rapport à une situation donnée, avec les contraintes attenantes, faire ce qu’il y a de mieux à faire. N’oublions pas qu’il y a quand même 40% des chances que l’on peut maitriser.

Souvent, je reprends un coup a posteriori.  Sur les sites de poker, il est possible de rejouer une main. Et de faire des calculs. Cela étant, souvent, il n’y a pas de réponse. C’est la beauté du jeu.

poker

Quand tu dis faire des calculs, tu les fais comment ? De tête, à la main, avec une machine ?

Je les fais avec des fichiers Excel, des simulations, avec de la programmation. Par exemple, imaginons que je sois en début de parole, et qu’il y ait dix personnes après moi. Je ne sais pas du tout ce qu’elles vont dire. J’ai une paire de 3, je n’ai plus beaucoup de jetons. Est-ce que c’est une bonne idée de miser ma pile ? Ce  sont des questions comme celle-là que je me pose quand je joue. Si je perds je vais dire « j’ai mal joué », si je gagne je vais dire « j’ai bien joué »…

Mais en fait quelle est la véritable réponse ?

Et alors ?

Il y a plusieurs facteurs. Par exemple comment sont les joueurs qui parlent après moi, comment ils me perçoivent. Si je n’ai pas bougé un œil depuis trois heures et que je fais subitement un gros coup les gens vont se dire « oh là, il a du jeu », alors que ce n’est pas forcément le cas, tandis que si j’ai joué toutes les mains pendant une heure ils vont dire « oh là lui il fait n’importe quoi » et je vais être plus facilement suivi. Donc c’est un jeu à plusieurs tiroirs. Il faut être un bon acteur… Ce jeu me comble en fait. Il a un côté carré, rationnel, commun avec les mathématiques, mais il a en plus le côté intuitif, irrationnel.

Pour toi, il n’y a pas d’intuition en mathématiques ?

Si bien sûr, mais plutôt dans la recherche. Dans mon métier de professeur, pas du tout. Au contraire, il faut que les choses soient carrées pour les élèves, pour qu’ils puissent voir une certaine logique et comprendre.

De quel milieu familial es-tu issu ?

Je viens d’un milieu plutôt aisé. Ma mère est professeur d’anglais, mon père ingénieur, il a fait l’INSA, il a travaillé chez France Telecom, Orange. Mes parents eux viennent de la campagne. Ils se sont sortis de leur milieu rural et avaient de beaux métiers aux yeux de leurs parents. Ils se sont élevés socialement.

J’ai un frère, plus jeune, qui a quatre ans de moins que moi. C’est un grand cerveau. Il a fait de belles études. Il a été en classes préparatoires au lycée Fermat, comme moi aussi, mais lui, il est allé en MP*, il a intégré les Mines de Paris. C’est l’une des meilleures écoles d’ingénieurs non ? Il a poussé la logique familiale à son plus haut niveau. Il a accepté d’investir tout son temps pour le travail, ce que moi je n’ai jamais accepté. Maintenant il a bien réussi, il a un poste assez élevé, il a beaucoup voyagé partout dans le monde, il est actuellement chez Alstom.

Revenons à toi, que tu dirais de ta scolarité ?

Tout à fait classique, primaire, collège, lycée, première et terminale S. Bac sans problème.

Et après je suis allé en classe préparatoire, maths sup, maths spé, au lycée Fermat, à Toulouse. Mon rêve c’était de faire l’Ecole Normale Supérieure. Ce qui est certain, c’est que je voulais être professeur.  L’idée de l’Ecole Normale Supérieure n’est peut-être pas venu de moi. Sûrement de ma mère. Mon père, il est plutôt épicurien comme moi. Il aurait suivi n’importe lequel de mes choix. Ma mère, elle, avait de grandes ambitions pour moi. Elle m’a dit « si tu veux être professeur, vise haut, fais Normale Sup ». C’était l’élite. Quitte à avoir un objectif, celui-là était bien.

Donc je suis allé là, et la prépa s’est bien passée. Je suis resté équilibré, n’ayant jamais consacré tout mon temps au travail. J’ai gardé une vie privée, une vie intérieure. J’ai été admis à l’Ecole Centrale Lyon, sur liste complémentaire. Je me souviens que pendant l’été, j’étais sur la plage en Espagne avec des amis, et le secrétariat de l’école m’a appelé. Ils m’ont dit « est-ce que vous venez ? » mais j’ai dit non, carrément. Et je suis allé à l’université, pour être professeur.

Et pourquoi as-tu dit non ?

J’ai regardé le programme et je me suis demandé ce que j’allais y faire pendant trois ans. Il y avait principalement des cours de physique et j’ai profondément détesté la physique toute ma vie. J’étais malheureux en cours, je me suis toujours ennuyé en TP. J’ai toujours honni ce qui est appliqué. J’ai un esprit assez théorique, et il n’y a que maintenant que je m’ouvre un peu à l’application des mathématiques, avec les nouveaux programmes. Moi j’aimais les mathématiques pures.

C’est paradoxal, parce que tu viens de me parler, passionnément, pendant plus d’un quart d’heure, de comment tu appliques les mathématiques au poker !

Oui, je suis en train de m’ouvrir à l’aspect pratique des mathématiques. Grâce au poker notamment, j’ai compris le sens des mathématiques. Mais c’est très récent.

Pendant mes études j’ai toujours fui comme la peste ce qui ressemblait aux mathématiques appliquées, maintenant c’est un peu différent. A tel point que quand j’étais en maîtrise de mathématiques, j’ai voulu faire un mémoire, sur le thème, « est-ce que les chercheurs savent à quoi sert leur recherche ». Les professeurs ont un peu souri, et m’ont dit « si tu veux vas-y ». Je me suis baladé dans les couloirs de la faculté, j’ai rencontré des chercheurs extraordinaires avec des looks improbables. Je me souviens en particulier d’un vieux professeur, qui travaillait sur les groupes de Lie d’ordre neuf, il était dans un bureau hallucinant avec des livres partout, jaunis, des cendriers pleins, il me dit « ça fait quinze ans que je travaille dessus ». Je lui demande si ce qu’il fait au quotidien a des utilisations concrètes. Parce que quand même, quand on fait des mathématiques à haut niveau, c’est bien, mais pourquoi ! Il m’a regardé stupéfait et il m’a répondu « non, je n’en sais absolument rien ». Ce qu’il m’a dit quand même, c’est qu’il avait la sensation de participer à l’avancée du cerveau humain, et que, dans ce qu’il faisait, il y a peut-être des choses qui seraient utiles plus tard. A l’occasion d’autres recherches. J’ai rapidement arrêté mon mémoire, parce que tous les professeurs m’ont fait plus ou moins la même réponse. Moi ce que je voulais c’était mettre en face de chaque chose qu’on voit en cours, la théorie, et l’application, faire le lien. Tout le monde dit par exemple « la théorie de Galois, c’est merveilleux ». Je voulais voir de quel grand ensemble ça fait partie et proposer une application un peu fouillée d’un truc qui marche mieux avec la théorie de Galois que sans. Mon mémoire n’a pas abouti. J’ai choisi un autre sujet, sans intérêt, je ne m’en souviens même plus.

As-tu aimé les mathématiques d’entrée de jeu ?

Non, moi en fait je suis plutôt littéraire. D’ailleurs après le bac, je voulais m’inscrire en hypokhâgne au lycée à Saint-Sernin, à Toulouse. Ce qui m’a dissuadé c’est la philosophie. Quand j’ai vu toutes les heures de philosophie qu’il y avait en classe préparatoire littéraire, je me suis dit que je ne pourrais pas faire cela.

J’ai beaucoup aimé l’Université. Parce que j’y jouais beaucoup aux cartes bien sûr… Mais surtout on me faisait confiance. On me disait « voilà, tu as un partiel en janvier, organises toi comme tu veux ». J’ai toujours répondu présent dans ces cas-là.

J’ai du mal quand on m’impose un rythme. Par exemple, j’ai fait du piano et devoir faire un nombre de pages imposé par semaine, c’était très compliqué pour moi.

Tout ce qui est répétitif, régulier, m’ennuie.  En général, je n’aime pas les rituels. J’aime bien me surprendre moi-même. Du coup, pour les mathématiques, c’est un peu gênant, parce que c’est très ritualisé. Je me suis toujours senti entre deux eaux. Je ne me considère pas comme un matheux dans l’âme !

Raconte-moi des souvenirs liés aux mathématiques.

Je n’ai aucun souvenir de mathématiques. J’ai des souvenirs bien entendu, mais plutôt des choses qui ont à voir avec les professeurs de mathématiques. Des choses plutôt négatives que positives d’ailleurs.

J’avais un professeur de mathématiques sympa au collège, avec une blouse, très bienveillant, qui nous avait invité dans sa maison pour faire un goûter, j’avais trouvé ça super. Mine de rien, en 6ème, ça compte.

Une autre chose positive dont je me souviens, c’est quand j’étais en maths spé, avec M. B. Il y avait un exercice sur les matrices, un tout petit peu intelligent, et j’avais été le seul à trouver. Il m’avait mis en valeur : « Ah Bastouil, il n’y a que lui qui a trouvé, il est malin ce petit ! ».  Cela m’a fait chaud au cœur ! Parce qu’en faisant l’exercice, je m’étais trouvé malin. J’avais trouvé un truc très simple, qui marchait bien, et je m’étais dit « Ah, tout le monde ne va pas trouver ça ». J’étais fier de moi.

Mais je n’ai pas de souvenir d’« illumination mathématique ».

Et des souvenirs négatifs alors ?

En collège, j’ai eu un zéro une fois, parce que je n’avais pas fait mon exercice. Et pour moi qui avait toujours de très bonnes notes, ça a été un traumatisme.

Mais pourquoi tu n’avais pas fait ton exercice ?

Je ne faisais pas toujours mes exercices. Je n’ai jamais été irréprochable, ni prétendu l’être. Mais ce dont je me souviens, c’est qu’il n’avait pas mis zéro qu’à moi, mais à tous ceux qui n’avaient pas fait l’exercice. C’était le genre de professeur  avec la blouse blanche, les grosses lunettes. Tous les élèves s’étaient retournés vers moi et avaient dit en cœur « Haaan ! »  Genre « lui il a zéro lui, quoi ! ». Je me souviens que grâce à ce cri, le professeur a annulé tous les zéros parce qu’il s’est rendu compte qu’il allait me mettre zéro et que ce n’était pas possible. En effet, j’étais un bon élève quand même et il s’est rendu compte que sa stratégie allait aboutir à mettre zéro à de bons élèves.

Finalement tu n’as pas eu zéro…

Mon premier devoir de mathématiques en classe préparatoire aussi c’est un sacré souvenir. Je l’avais plutôt bien réussi, parce qu’en fait sur les quatre exercices proposés, j’en avais fait deux pendant les vacances. La professeure, Mme P. rend les copies. Elle dit, « la moyenne c’est 4,5, mais quand il y a des bonnes notes, je les ai mises ! » La meilleure note c’était 19.  Moi j’étais là, … je stressais. Et à côté de moi il y avait Vincent C. avec sa grosse barbe et qui disait « ah c’est ch…la prépa ». Elle me rend ma copie, 9 et j’étais 4ème.  Lui il avait eu 19. Il a fini à Polytechnique dans les premiers… Au passage, j’ai toujours adoré ce système de classement, ça m’a toujours convenu. Ce qui m’intéressait, c’était de progresser.

Cette professeure de Maths Sup donnait à chercher chez soi des « exercices chocolat ». Ces exercices étaient plus durs, plus ouverts et facultatifs. Ceux qui les trouvaient avaient droit à une plaque de chocolat. Il y avait un de ces exercices « chocolat » qui me plaisait et j’avais passé une bonne partie de la soirée à le chercher, j’avais rédigé une belle solution, sur une page entière. Le lendemain, elle me l’a rendue avec un petit air méprisant, en me disant « tu n’as pas très bien compris le problème je crois. » Ça m’a fait « Argggggg !!!! », c’était terrible. Des évènéments comme celui-là, je n’en ai pas beaucoup vécu dans ma vie. Il m’a marqué, j’en rêve encore parfois. Dans la classe, certains élèves avaient trouvé, ils ont eu droit à « bravo, c’était très fin, très subtil ! ».

Mais cela a eu néanmoins un côté positif. J’étais un très bon élève au lycée, brillant, et là quelqu’un m’a remis à ma place. Ça m’a beaucoup aidé finalement. J’ai compris que je n’étais pas quelqu’un d’exception, que j’étais un élève normal. Cela m’a enlevé une certaine pression. On me voyait un certain nombre de qualités, dans le rapport humain notamment, donc pour ce que je voulais faire c’était bien, et puis pour le reste, ça m’a rassuré quelque part. Quand on voit qu’il y a des gens plus intelligents que soit, ça rassure.

Toi peut-être, mais il y a des gens que ça déprime.

Moi non, ça ne m’a jamais déprimé. Je n’ai jamais été déprimé de toute manière. Non, ça m’a enlevé une pression. Ma mère m’avait mis une pression très forte, elle avait de grandes ambitions pour moi. Parfois elle rentrait dans ma chambre et me disait « là tu ne travailles pas, tu es sûr que tu peux le permettre ? »  Ce n’est pas un reproche, parce que ça m’a certainement permis de réussir dans la vie, mais cette pression permanente de savoir si j’utilisais bien mon temps, c’était lourd.

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Une belle entrée du groupe lycée-collège Pierre de Fermat.

 Ta mère semble avoir eu une grande influence sur tes choix de jeunesse, est-elle fière de toi maintenant ?

Je pense qu’elle est fière de ce que je suis devenu même si elle n’a pas le compliment facile.  Je suis admiratif de tout ce temps qu’elle a consacré à nous accompagner, mon frère et moi, dans notre scolarité. Maintenant que j’ai des enfants, je comprends ce souci qu’elle a eu de nous pousser à donner le meilleur de nous-même. Je réalise aussi que ce n’était pas facile pour elle, ce n’est pas évident de consacrer, après sa journée de travail, du temps aux enfants, pour les aider à faire leurs devoirs, leurs dissertations….

Mon père aussi nous a soutenu, il s’occupait de la « partie scientifique » de la scolarité.

Je leur suis extrêmement reconnaissant, c’est grâce à leur engagement que j’ai la vie que j’ai maintenant.  J’espère pouvoir en faire autant pour mes enfants. J’avoue que parfois cela m’angoisse un peu….

La famille est très importante pour moi, j’ai une vision très épicurienne de la vie, cela passe par de fréquentes et sincères relations familiales. C’est pour cela que j’ai été très heureux que ma femme décide de venir vivre à Toulouse, dans mon fief natal et qu’ainsi nous puissions être près de ma famille. De la même façon, j’apprécie beaucoup d’aller voir mes beaux-parents à Dijon et de passer un maximum de temps avec eux.

Même si la communication a toujours été difficile dans ma famille, je fais tout pour que mes parents soient fiers de moi, et je pense qu’ils le sont.

Quel est ton rapport aux mathématiques ?

Les mathématiques m’ont toujours paru naturelles. Je ne me suis jamais dit « ouah !! ! ». Par exemple, les nombres complexes, quand je les enseigne aux élèves de terminales, je vois bien que pour eux c’est un truc dur, étonnant. Alors que pour moi, c’était normal. Mais je n’ai jamais eu d’émerveillement du coup, je dois le reconnaître.

Pourtant, je déteste chercher. Quand je cherche, j’ai toujours l’impression que je n’ai pas les outils pour le faire. Tout ce qui est jeu mathématique, défi, concours, énigme, ne m’amuse pas du tout. J’ai un ami qui fait les championnats de France de jeux mathématiques, il y passe des heures et des heures. Mais moi ce n’est pas du tout la partie des mathématiques qui m’intéresse. Cela peut sembler curieux.

Tu me demandais mes souvenirs d’émerveillement, mais ils sont plutôt littéraires. En français par exemple quand je lisais Bilbo le Hobbit en CP, je me souviens d’avoir été choisi pour lire devant la classe parce que je lisais bien, c’est un souvenir très positif. En Histoire-Géo je me rappelle mon cahier avec la couverture verte où j’écrivais le nom des choses. Ce sont des bons souvenirs. L’anglais, j’avais un bon niveau, j’aimais bien, j’allais en Angleterre l’été… Tu vois c’était plutôt ce genre de choses.  Les mathématiques j’adorais mais c’est comme si tout ce qu’on m’apprenait était normal, s’enchaînait bien.

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Pourquoi as-tu choisi d’enseigner les mathématiques ?

C’est pour le côté égalitaire. Le fait d’aimer la littérature, de lire, c’est très culturel. J’ai des élèves qui n’ont pas de livres chez eux, qui ne lisent pas. Il est alors très difficile de leur demander de s’intéresser aux mots, aux concepts, aux idées. Moi ma mère me demandait de lire quatre-vingt pages par jour. J’étais un peu plongé la tête dedans, mais j’ai développé une grande passion pour la littérature. En région parisienne j’ai eu des élèves qui avaient le même problème mais en mathématiques. Ils avaient un niveau zéro. Néanmoins, les progrès qu’ils font entre le mois de septembre et le mois de juin sont époustouflants ! Il suffit d’apprendre très peu de choses, développer, un peu la variable, le x, c’est tellement logique les mathématiques, c’est tellement naturel que des progrès sont possibles en peu de temps. Il n’y a pas besoin d’avoir trop de connaissances au départ. Chaque année j’ai des élèves de Terminale S qui ont 1 au premier devoir et 18 au bac. Je ne crois pas que ce soit possible dans une autre matière. Et c’est cela qui me plait. C’est mon côté formateur. Je peux voir les élèves progresser, aller de 0 à 20.

Dirais-tu que ce qui t’intéresse le plus dans l’enseignement, c’est le rapport humain ?

Oui, tout à fait. La proviseure du lycée Saint-Sernin, m’a mis comme commentaire « relationnel facilitant ». J’ai montré ça à ma femme qui est manager, elle a ri, elle m’a dit « ah oui, le relationnel facilitant, c’est celui qui est toujours d’accord avec tout le monde, qui fait en sorte que tout se passe bien. C’est celui qui, quand tu n’as pas de monnaie au café te sort vingt centimes pour te dépanner.  Il en faut dans toutes les équipes, mais pas trop non plus ». J’ai bien ri. C’est un terme de management. Moi, j’ai toujours eu « un relationnel facilitant ». J’aime les élèves, les mathématiques ne sont qu’un prétexte.

Mais je me sens à l’aise pour enseigner les mathématiques. Je transmets, via cette discipline, des qualités, des valeurs, une démarche, qui sont utiles dans la vie. Un moment que j’apprécie particulièrement, c’est par exemple ce matin, avec mes secondes :  je leur ai donné un contrôle de rattrapage, qu’on avait bien préparé en classe. Je les ai vu tranquilles, sans pression, faire leur exercice. Qu’est-ce qu’on peut en retirer ? C’est que, si on a l’outil, si on maîtrise, ça se passe bien.

C’est une démarche. Alors que, a contrario, parfois, dans la vie, il y a des gens qui essayent de faire un trou dans un mur et n’ont aucune des connaissances requises pour y arriver. Evidemment le mur s’écroule !

C’est quoi les mathématiques pour toi ?  

C’est le langage de Dieu. J’adore cette phrase que j’ai lu je ne sais plus où. Moi je n’ai aucune culture mathématique. Mon mathématicien préféré je n’en sais rien, je n’en connais pas, je n’ai eu aucun cours là-dessus. Par contre, le langage de Dieu, pour moi, c’est exactement ça.

Prenons les marées, c’est un bel exemple, l’eau qui monte, l’eau qui descend, c’est « dieu » enfin la nature. Les physiciens mettent la nature en équation, et nous, les mathématiciens, on résout les équations. Le langage de Dieu, parce que le langage mathématique sert à comprendre, à expliquer comment le monde fonctionne. C’est à cela que sert d’enseigner les mathématiques.

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Es-tu es croyant ?

J’ai eu une éducation religieuse, je suis même confirmé ! D’un côté mon esprit cartésien a toujours rejeté le folklore religieux, mais d’un autre côté, j’ai un certain nombre de convictions, une sorte de respect pour un certaines choses qui nous dépassent.

Je comprends que l’être humain ait besoin de s’accrocher à la religion, dans la souffrance, le deuil, la maladie, la peur, le désespoir.

J’imagine que je pourrais moi aussi me tourner vers la religion si j’avais un gros problème dans la vie.

Quand je suis allé à Lourdes, cela m’a donné à réfléchir. Ce qui est sûr c’est que, manifestement, la religion a apporté du bien-être et du secours à bien des personnes.

Non je ne crois pas en Dieu mais j’ai toujours eu l’impression d’avoir vécu ma vie sous une bonne étoile. A maintes reprises j’ai hésité sur certaines décisions et il se trouve que la pièce est toujours tombée du bon côté…comme si quelqu’un veillait sur moi…

Et puis la beauté de la nature, la complexité merveilleuse du fonctionnement du corps humain…cela m’incite à rester humble. Sait-on jamais ?

Quel rôle les mathématiques ont-elles joué dans ton développement personnel ?

Les mathématiques sont pour moi un moyen d’être moi-même. J’ai toujours été très heureux, même quand j’étais seul. J’ai toujours été très solitaire d’ailleurs. A dix-huit ans, mes parents m’ont laissé le choix entre la voiture et l’appartement, quand je suis rentré au lycée Fermat. J’ai choisi l’appartement.

Ce qui me rassure dans les mathématiques, c’est qu’il est possible de s’évaluer, de voir où l’on en est. Cela m’a permis de gérer la pression. Si on suit la règle du jeu, on va y arriver. Peut-être pas quand on fait de la recherche mais c’est une autre histoire. Je me souviens que quand j’ai préparé l’agrégation, j’adorais ça.

Alors qu’en français et en philosophie, ce qui m’a gêné, c’est que je n’arrivais pas à m’évaluer. Je ne savais pas si ce que je faisais était bien. Je me demande aussi parfois si je sais si ce que je lis est bien. Certains  livres obtiennent le prix Goncourt, et moi je n’arrive même pas à les lire ! Ils m’ennuient, je ne les comprends pas. Qu’est-ce que cela veut dire ? Ce sont des livres censés être les meilleurs et moi je n’arrive même pas à comprendre ? Pourtant j’ai une certaine culture.

C’est peut-être que je n’ai jamais eu confiance en moi. Je savais que c’était possible d’avoir vint sur vingt en mathématiques, alors qu’en français, même quand on me disait « c’est très bien ce que tu as fait », j’avais quatorze. Je vivais cela comme « non, ce n’est pas parfait ».

Comment les mathématiques interviennent-elles dans ta vie quotidienne ?

A part au lycée, je ne parle pas de mathématiques, je ne lis pas de livres de mathématiques.

Je constate pourtant, que, quand j’ai un problème dans ma vie, et que je l’aborde comme un problème de mathématiques (quelles sont les différentes possibilités pour résoudre le problème, quelle est la meilleure…) cela fonctionne. Mais je ne le fais pas toujours.

Par exemple, j’ai du mal à m’organiser. Ce  serait plus rationnel que je range mes cours à chaque fois. Mais je laisse tout en vrac sur mon bureau et je me retrouve avec une énorme pile au mois de juin. J’ai conscience que ce n’est pas optimal, mais je ne fais pas autrement. Je sais ce qu’il faudrait faire, mais je ne le fais pas.

Je te donne un autre exemple : dans mon jardin, j’ai une mare à refaire, qui n’a pas été entretenue depuis une vingtaine d’années. Depuis quatre ans que je suis dans ma maison, je n’ai rien fait, parce que justement je n’aborde pas la chose comme un problème scientifique. Je me dis que je ne sais pas le faire et elle reste comme ça. Le jour où je me dirais : « c’est un problème, d’autres y ont déjà été confronté, je vais voir comment ils ont fait ». Je construirais un fichier, où je noterais les références des sites, les différentes étapes, etc.  J’arriverais à une démarche : la vider, enlever la base… Et voilà, je sais faire !

Hypothèse, théorème, résultat. C’est un principe de vie, un principe de travail et un principe de rédaction pour les élèves.

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En fonction du résultat que je veux, je vais choisir dans une liste de théorèmes. Evidemment il faut bien comprendre le théorème. J’estime que si on a les bonnes hypothèses, et le bon résultat, le théorème on doit le comprendre.

C’est ainsi que je réfléchis. Par exemple au poker, face à une situation donnée par rapport à un certain nombre de facteurs que je peux me dire c’est cela que je dois faire », et je le fais sans douter de moi-même, parce que c’est la meilleure décision. Je peux toujours perdre ou gagner, mais c’était la meilleure décision.

Que  réponds-tu à tes élèves s’ils te disent « les mathématiques ça ne me sert à rien à moi, ça ne m’apporte rien… » ?

Je trouve que les nouveaux programmes vont dans la bonne direction, et permettent d’apporter des réponses. On fait de la résolution de problèmes. Je me suis fixé d’aller huit fois dans l’année en salle informatique avec mes secondes.

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Avec un logiciel, on expérimente, on se rend compte que le problème a une solution. Puis on passe à la mise en équation, avec des petits outils simples. Et après la résolution. Chez moi elle est sanctuarisée. C’est la différence entre « il semble que » et « je suis sûr ». Alors certes, ce n’est pas la vie de tous les jours. Mais on peut imaginer qu’on ait à créer un motif pour faire le logo d’une entreprise.

En général, les élèves sortent contents, ça leur convient. Ils ne peuvent plus dire « ça sert à rien ». En effet, on se posait une question, on ne connaissait pas la réponse, et grâce aux mathématiques, on l’a trouvée. Je commence toujours les séances en demandant la réponse intuitive, et personne ne sait quoi répondre. C’est cela qui est beau.

Au poker c’est pareil. Au-delà des croyances et de l’expérience, on peut faire une démonstration, avec des arguments irréfutables.

D’autre part, certains élèves, et c’est également mon cas, sont justement très contents que cela ne serve à rien, de concret en tout cas. Par rapport aux autres matières, où c’est parfois lourd, les guerres, les produits qu’on mélange et qui explosent, là, on va factoriser, développer, ça vide la tête. Cela n’est pas en rapport avec le monde actuel, c’est une bulle de paix.

Quand j’étais à Paris il y a une dizaine d’année, j’ai fait un voyage scolaire à Madrid, avec des élèves de premières S. J’aime beaucoup l’art, le design. Les élèves sont tous restés scotchés devant un tableau de Dali, « jeune fille à la fenêtre », un tableau magnifique. J’ai acheté une affiche de ce tableau, et avec les élèves, on a mesuré les différentes proportions, des carreaux, des fenêtres, le rectangle de la mer, etc. On a trouvé dix occurrences du nombre d’or dans ce tableau. Le nombre d’or, la proportion idéale ! C’est pour cela que ce tableau est extraordinaire. Les mathématiques, cela sert aussi la beauté dans l’art !

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La jeune fille à la fenêtre, de Salvador Dali

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 Si (a+b)/a=a/b, a et b sont en proportion idéale. Et cette proportion est le nombre d’or, la « divine proportion ».

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Une étude de la Naissance de Vénus de Botticelli, mettant en évidence les « divines proportions »

 

Est-ce que tu as une formule mathématique préférée, ou un résultat qui te plait ?

J’ai choisi trois situations.

D’abord l’identité d’Euler:eulers-identity-fr

2016 Benoît Leblanc

Quand j’accueille les élèves de terminale S au début de l’année j’écris cette formule au tableau. Comme un exemple de chose qui n’a aucun sens pour eux maintenant, mais qui à la fin de l’année leur paraîtra naturelle. Cette formule regroupe tous les nombres les plus célèbres des mathématiques. J’utilise cela comme un fil rouge pédagogique.

Après j’ai de l’affection pour:

   \sum _{{n=1}}^{\infty }{\frac 1{n^{2}}}={\frac {\pi ^{2}}6}.

Je trouve fascinant qu’une série converge vers ce nombre là. Pourquoi π? J’essaye d’expliquer, de partager cela avec les élèves. C’est un peu à la frontière du programme de terminale, mais il est possible de s’en approcher.

Et pour finir, il y a le « célèbre » problème de la caisse enregistreuse!

Depuis que j’enseigne au lycée Saint-Sernin, on a mis en place un « projet scientifique ». Toutes les classes de S sont en relation avec un lieu de l’enseignement supérieur. Nous, nous sommes en contact avec les chercheurs en mathématiques de l’IMT.

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Tous les ans ils viennent avec « le » problème de l’année, et ils nous laissent deux mois pour le résoudre… L’an dernier ils sont venus avec le problème suivant :

J’ai une boulangerie, avec une caisse enregistreuse. La baguette coûte un euro et les gens payent avec une pièce de 1 euro ou une pièce de 2 euros. Il y a 100 clients qui se succèdent dans la journée, 60 payent avec une pièce de 1 euro, les autres avec une pièce de deux euros, mais on ne sait pas dans quel ordre.

Question :  combien doit-il y avoir au minimum de pièces de 1 euro au départ dans la caisse, pour satisfaire tous les clients avec une probabilité de 95% ?

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Bien entendu, quarante est une solution évidente et satisfaisante, mais on veut le minimum de pièces.

Quand on me pose ce genre de question, ça m’intéresse parce que je ne connais pas la réponse, mais je n’ai pas du tout envie de chercher. Mon premier réflexe c’est regarder où est la solution, aller la trouver, dans un livre, sur internet. Pour moi il s’agissait d’un problème de probabilité, alors qu’en fait c’est un problème de dénombrement. Je me suis senti en panique quand le chercheur est parti. J’avais la sensation désagréable de ne pas avoir tous les outils pour pouvoir résoudre ce problème. Je déteste chercher, mais si on me certifie que je peux y arriver, alors éventuellement je peux me mettre à chercher. Mais ce que j’ai préféré dans cette histoire, c’est avoir trouvé la solution, la lire, la trouver belle et l’enseigner aux élèves. Parce que pour eux, ce n’est pas simple. Et quand j’ai vu les élèves à l’IMT, présenter des diapositives, avoir écrit des algorithmes pour simuler le problème, j’ai trouvé tout cela passionnant. Au final, la réponse c’est cinq. Je m’en sers aussi pour dire aux élèves à quoi peuvent servir les mathématiques.  Si on a quarante pièces dans la caisse et qu’on se fait braquer, on perd quarante euros. Alors que cinq pièces suffisent. Et perdre cinq euros c’est moins grave.  Bien sûr, il reste quand même cinq pour cent de chances que cela ne suffise pas. Qu’est-ce qui se passe dans ce cas-là ? On fait la bise au client, en lui disant de repasser demain. Cinq pour cent du temps, c’est mineur.

Rêve de François

Mon rêve dans la vie en fait, c’est d’écrire un roman. A toutes les étapes de ma vie j’ai commencé un livre. Au début je répétais des choses que je venais de lire, puis j’ai écrit des choses plus personnelles. Quand j’étais à Paris, j’ai écrit une nouvelle dans un café. C’est un truc que je rêvais de faire, et je l’ai fait. Cela montre à quel point les mathématiques, ce n’était pas vraiment ma tasse de thé.

Une fois, on a fait un concours de nouvelles entre amis et c’est moi qui ai gagné, j’ai été élu « meilleure nouvelle ». J’étais vraiment enchanté ! Je l’ai fait lire à deux professeurs de français que je respectais beaucoup. J’en ai choisi un jeune, de mon âge et un très, très vieux. Les deux m’ont complètement détruit . Ils m’ont dit que c’était nul et sans intérêt. Ils m’ont rendu mon texte comme une copie, avec des commentaires sarcastiques. A un moment j’avais mis un petit proverbe que j’aimais bien, j’ai eu droit à « proverbe de commentateur de match de foot ».

Pour te dire à quel point cela m’a blessé, quand il y en a un des deux qui est mort, j’étais content, parce que je me suis dit « au moins ça en fait un de moins sur terre qui a lu ce texte ».

Peut-être que j’aimerais écrire un livre de poker avec des calculs de mathématiques simples répondant à des questions classiques.

C’est certainement rêve de célébrité, caché. J’aimerais bien avoir mon nom sur un livre. Mais je ne sais pas si j’oserais jamais.

En tout cas, je ne montrerais plus ce que j’écris à des professeurs de français !

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Le livre à venir

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